Région
Mâconnais
Appellation
Pouilly-Fuissé
Cépage
Chardonnay
Situation
C'est un assemblage des petites parcelles situées tout autour de l'amphithéâtre de Fuissé, ce vin est l'ambassadeur de ce beau théâtre.
Âge des vignes
Plantées entre 2018 et 1947, un peu plus de 70 années séparent la jeune plantation de leurs aînées. La moyenne est de 40 ans. C'est par ailleurs dans l'une des vignes les plus âgées de cette cuvée (« Les Vernays » plantée en 1955) que s'effectue la sélection massale du domaine.
Sol
A elle seule, cette cuvée illustre toute la complexité géo-pédologique de la commune de Fuissé. Une partie est granitique avec environ 1/3 orienté à l'ouest issu de schistes, de grés volcano-sédimentaire et tufs rhyolitiques, les autres 2/3, orientés à l'est, sont issus de calcaires et marnes du jurassique mais aussi d'argiles résiduelles.
Vinification
Exceptionnellement sur ce millésime, la cuvée a été, du fait de son exceptionnelle concentration vinifiée avec une proportion de fût plus important qu'à l'accoutumée. (80% de fûts dont 25% de fûts neufs). Vinification, puis élevage en fût de 10 mois, puis encore 6 mois de cuve pour parfaire son gainage. La mise en bouteille le 11 janvier 2021 fut accompagnée des rares flocons de neige de l'année.
Dégustation
Jolie texture balançant entre croquant juteux et moelleux gourmand . Un boisé réducteur de bon augure pour la garde signe cette cuvée.
Accords mets-vin
Crustacés et fruits de mer, poissons grillés et poêlés. Viandes blanches et fromages frais de chèvre ou de vache.
Le Millésime
Bien avant le flot de douceur qui s'étendit dès janvier, bien avant la mi-février (mois au cours duquel le mercure culmina à plus de 20°C), bien avant la sortie aux premiers jours de janvier du roman Sérotonine : peut-être aurions-nous dû comprendre plus vite... Car cet évènement littéraire annonçait la thématique du millésime : récalcitrant, agaçant. Tel Michel Houellebecq, rien ni personne n'a su dompter la force de la nature en 2019. Mais, contrairement à celles de 2018, les réserves en eaux à la sortie de l'hiver étaient bien maigres et la campagne végétative débuta déjà en déficit hydrique.
Après la sinistre douceur de l'hiver arriva la douloureuse fraîcheur printanière. En avril, Notre Drame fut le gel...mais pas que. Les rares brûlots frémissants tentèrent vainement de protéger les bourgeons des vignes non loin de la Romanin...peine perdue. Grâce à Dieu, les pentes furent épargnées.
Tout comme avril, les températures en mai furent en dessous des normales saisonnières. L'avance capitalisée avec les beaux jours fondit comme neige au soleil. La vigne végéta, la fleur se fit attendre. Fin mai, c'est un retard de treize jours que nous comptions si nous nous référions à l'année écoulée.
Début juin, les premières fleurs apportèrent avec elles de belles promesses. Les grappes dénombrées étaient presque abondantes.... Mais ces espoirs furent vite balayés : le millerandage était la règle, sur Fuissé tout au moins. Un vent impétueux sévit sur l'amphithéâtre, compromettant en partie la générosité de nos grappes, laissant même par endroit les apex noircis, fouettés... Nous n'avions toutefois pas tout vu, pas encore vu la une du Times avec Antonio Guterres, secrétaire des Nations Unies, en costume, les pieds dans la mer avec pour légende « Notre planète est en train de sombrer », pas encore vu non plus la fermeture des écoles fin juin, résultat d'une canicule précoce inédite....Mais tout n'était pas perdu. Le mois de juin apporta aussi des pluies, plus abondantes que la moyenne décennale. Il fallait y voir un signe d'espoir, un réconfort, les bras de Jacinda Ardern.
Juillet se poursuivit finalement sans surprise, tant ces caractéristiques - chaud et sec - sont à présent redondantes. Le mildiou n'était donc pas à craindre dans ce millésime contrairement à l'oïdium, d'une agressivité fébrile.
La véraison s'enclencha malgré tout de façon assez homogène vers le 5 août. Quelques épisodes pluvieux nous apportèrent de l'eau et de l'espoir. Fin août, les grappes du Tournant de Pouilly ne faisaient pas plus de cinquante grammes, si fragiles dans notre main. Les pellicules étaient encore très fermes. Encore un dilemme. A nouveau, il nous faudrait attendre. Attendre, certes, que la maturité avance, attendre que les pellicules s'attendrissent, attendre que le goût du raisin se révèle.
Malgré notre situation méridionale, nous démarrâmes les vendanges le 10 septembre, sans trop d'avance sur nos confrères de la Côte d'Or et même de Chablis.
Les seaux peinèrent à se remplir, même si nous ne cessions de couper. Les moûts étaient cristallins et concentrés, certes pas chiches en sucre mais dotés d'acidités inattendues.
Le 23 septembre, les portes de notre cuverie se refermèrent sur notre modeste récolte... Ce même jour de l'autre côté de l'Atlantique, une jeune fille de seize ans prononça ces mots : « Le monde se réveille, et le changement arrive, que cela vous plaise ou non. »
Difficile de croire que cette année avait été proclamée année de la modération par l'ONU ! Ne nous faudrait-il pas sérieusement faire preuve de plus sobriété... environnementale ! Finalement, cette année fut encore une belle leçon.
Il n'est pas trop tard.